play_arrow

keyboard_arrow_right

Listeners:

Top listeners:

skip_previous skip_next
00:00 00:00
playlist_play chevron_left
volume_up
  • cover play_arrow

    Salut les Sixties

  • cover play_arrow

    Le Rock chez les Soviets.

Artistes

Abd Al Malik

today22/11/2006 1

share close

Né en1975, Abd al Malik a grandi dans l’énorme “quartier difficile” du Neuhoff, à Strasbourg, de parents congolais. Des intellectuels – ce qui ne l’a pas empêché d’être confronté à tout ce qu’un noir, pauvre, finalement élevé par une mère seule, sans qualification, avec six frères et sœurs, peut connaître de la misère des banlieues et de ses échappatoires : vols et deals, braquage, argent facile, frime et mépris pour les “bouffons” qui obéissent au système et ne font que travailler. Son intelligence, sa référence à des parents cultivés, le courage exceptionnel de sa mère, sa chance aussi et une sorte de grâce naturelle, fit qu’il devint néanmoins un lycéen brillant, dans une bonne institution catholique… sans cesser de monter dans la hiérarchie de la délinquance de sa cité. Ce double rôle faillit le rendre fou une première fois, alors qu’il n’avait pas quinze ans, quand les drogues dures firent leur entrée et que beaucoup de copains moururent – les autres perdant souvent tout sens de l’honneur. Or, s’il se sentait coupé en morceaux, celui qui s’appelait encore Régis, encouragé par sa mère très chrétienne, n’abandonnait pas une forme de quête intérieure, qui le faisait prier Dieu… de l’aider à réussir ses coups et de le protéger de la police ! Mais le christianisme demeurait trop mental et ne lui parlait pas physiquement. À seize ans, il finit par suivre son frère aîné, Bilal, et se convertit à l’islam. Irrépressible pression du quartier ? Non, cela se passa, selon lui, de façon naturelle : rebaptisé Abd al Malik, il eut l’impression de se retrouver « enfin chez lui ». Ses cinq autres frères et sœurs l’imitèrent d’ailleurs tour à tour, approuvés par leur mère, décidemment large d’esprit. Tout semblait se simplifier.

Mais la schizophrénie ne fit que s’amplifier, car entre-temps il avait rejoint un groupe de rap, les NAP (New African Poets), alors que ses nouveaux maîtres à penser puritains voyaient dans la musique une voie de perdition. Devenu musulman modèle – tout en poursuivant des études de philo à la fac ! -, il abandonna la délinquance, mais pas le rap, qu’il poursuivit sans le dire aux imams intégristes qui gouvernaient les mosquées de Strasbourg. En peu de temps, portant désormais la barbe, le jeune homme, muslim zélé, en sut assez pour être invité par ses aînés à prêcher dans toute la France. Ce qu’il fit avec enthousiasme.

Seulement voilà, la notoriété des NAP, elle aussi, s’étendait maintenant à l’ensemble du pays et les imams, évidemment au courant (on lui demandait des autographes à la sortie des mosquées !), finirent par demander à Abd al Malik de renoncer à cette diablerie. Un doute existentiel nouveau s’empara de l’artiste. Lâcher la musique ? Le réseau musulman auquel il appartenait, le tabligh, sorte de « mission pastorale » destinée à réveiller les fidèles assoupis, lui fit rencontrer plusieurs fois son dirigeant le plus célèbre, Tariq Ramadan, déjà omniprésent dans les médias. Mais, malgré les embrassades, le discours de ce dernier sonna très creux aux oreilles du rappeur mystique (qui avait pourtant étudié tous ses livres) : il eut l’impression de se retrouver « au parti communiste ». On tolérait qu’il continue à chanter, mais à condition de soumettre ses chansons à un comité ! C’est alors qu’en plein désarroi, conseillé par son compagnon il se plongea dans la lecture d’un texte soufi de Ghazali datant du XI° siècle, “Le Tabernacle des lumières” …

Une émotion considérable s’empara de lui. Brusquement, un maître musulman lui apportait des réponses profondes à toutes les questions qui l’assaillaient. Des réponses parlant au cœur et aux tripes et balayant toute ratiocination mesquine : cet islam-là voyait les juifs et les chrétiens comme des frères. Mieux : il faisait de l’autre, de confession différente, une entité indispensable, la preuve de la beauté multiple du divin. Et ici, le “grand djihad” ne consistait pas à tuer quiconque, mais à mener la guerre contre son propre ego. En quelques semaines, Abd al-Malik dévora tous les livres soufis qu’il put trouver, d’Ibn Arabi à l’émir Abd el-Qader. Mais sa surprise dépassa toute mesure quand il découvrit Amadou Hampâté Bâ, mort moins de dix ans plus tôt. Il s’était imaginé que les soufis appartenaient au lointain passé ! Ils existaient donc toujours ? Il lui fallait les rejoindre au plus vite !

Si vous voulez savoir comment les choses se passèrent, de Strasbourg à Madagh – où vit sidi Hamza Boudchich, le maître soufi de Faouzi Skali -, via Paris, New-York et Fès, achetez le formidable livre où Abd al Malik raconte les trente premières années de sa vie. Sans plaisanter : “Qu’Allah bénisse la France !” devrait être lu dans toutes les écoles de France ! Un vrai roman, où ce jeune Français noir des quartiers dit comment il a trouvé sa voie dans le soufisme, « islam lumineux centré sur l’amour universel, qui vous réconcilie avec l’esprit de citoyenneté et vous fait entrer dans le face à face des cœurs. »

Extrait de Nouvelles Clés

http://www.nouvellescles.com

Pour en savoir plus 
http://www2.abdalmalik.fr/
]]>

Écrit par: Jean-Claude

Rate it
0%